A la base du Renouveau charismatique catholique
(RCC) se trouve " une expérience joyeuse de la grâce
de Dieu " qui conduit le chrétien à puiser à
la richesse du christianisme non " par obligation ou par la force
mais parce qu'il se sent attiré ", a affirmé le
père Raniero Cantalamessa, OFM cap.
Le prédicateur de la Maison pontificale
a prononcé ces paroles le 4 juin dernier, dimanche de la Pentecôte,
à Marino (Italie) en présence de plus de 7000 membres
du RCC venus du monde entier pour participer à une rencontre
qui avait pour thème : "
Mon âme exalte le Seigneur ".
Cette rencontre était organisée
par l'ICCRS dans le cadre de la préparation du 40ème
anniversaire du RCC qui aura lieu en février 2007.
Le père Cantalamessa a expliqué
que dans la Bible l'Esprit Saint se révèle de deux manières
différentes : une manière appelée " charismatique
" c'est-à-dire que " l'Esprit Saint accorde des dons
particuliers " non pas pour le " progrès spirituel
" ou comme " récompense pour la propre sainteté
" de celui qui les reçoit, mais pour " édifier
la communauté " ; une autre manière d'agir de l'Esprit
est appelée " transformante ou sanctifiante ", c'est-à-dire
qu'elle est basée sur la transformation de la personne si bien
que celle qui en fait l'expérience en ressort régénérée
et revêtue d'une " vie nouvelle ".
" Cette action
transformante de l'Esprit est une expérience, et non une idée
de la grâce ", a-t-il expliqué.
Le père Cantalamessa a ajouté
que " ces deux manières d'agir de l'Esprit Saint que nous
avons vues dans toute la Bible et du jour de la Pentecôte à
aujourd'hui , se sont manifestées de manière saisissante
dans le Renouveau charismatique ".
Il a expliqué que le Renouveau charismatique
a ainsi fait " réapparaître dans l'Eglise les charismes
de la Pentecôte, qui s'étaient perdus ", et a constitué
d'une certaine manière " la réponse de Dieu à
la prière du pape Jean XXIII pour une nouvelle Pentecôte
" faite au début du Concile Vatican II.
Interrogé par Zenit en marge de cette
rencontre, le père Cantalamessa raconte son expérience
personnelle liée au Renouveau charismatique et explique ce
que ce " courant de grâce " peut apporter à
l'Eglise et au monde aujourd'hui.
Zenit : Dans l'Evangile de Jean Jésus
répond aux questions de Nicodème en affirmant que "
l'Esprit souffle où il veut " (Jn 3, 8). Pensez-vous qu'il
soit possible d'interpréter la direction dans laquelle souffle
l'Esprit Saint ?
P. Cantalamessa : Dans son homélie
pour la Veillée de la Pentecôte le pape a dit une chose
très belle en commentant ces paroles de l'Evangile de Jean.
Il a dit effectivement que l'Esprit " souffle où il veut
" mais il a précisé que l'Esprit ne souffle jamais
de manière désordonnée, contradictoire. Nous
avons derrière nous toute la tradition de l'Eglise, la Doctrine
des docteurs de l'Eglise, le Magistère de l'Eglise, pour discerner
quels charismes sont valides et quels charismes ne le sont pas. Il
peut arriver qu'au départ il y ait des charismes qui fassent
beaucoup de bruit, qui attirent beaucoup l'attention mais qui avec
le temps se révèlent sans fondement. L'Eglise est comme
l'eau : elle reçoit tous les corps, mais les vrais, les corps
solides, elle les accueille en son sein, alors que les autres, elle
les laisse à la superficie. Les charismes qui sont vides, qui
ne sont que manifestation extérieure, restent à l'extérieur
de l'Eglise.
Zenit : Selon vous, dans le contexte
actuel, les Mouvements ecclésiaux sont-ils davantage appelés
à un élan d'évangélisation, à un
engagement dans le dialogue cuménique ou à combattre
la sécularisation ou la crise de la famille ?
P. Cantalamessa : Je suis convaincu,
comme le pape s'est également déclaré convaincu,
que les Mouvements sont une grâce de l'Eglise d'aujourd'hui
; une réponse adaptée au monde d'aujourd'hui, au monde
sécularisé, à un monde où les prêtres
et la hiérarchie n'arrivent plus à entrer et qui a donc
besoin des laïcs. Ces Mouvements de laïcs sont insérés
dans la société, ils vivent au milieu des autres. Je
pense par conséquent qu'ils ont une tâche extraordinaire
et que grâce à Dieu, il ne s'agit pas d'une utopie pour
l'avenir mais de quelque chose que nous voyons de nos propres yeux
car les Mouvements ecclésiaux sont aux avant-postes de l'évangélisation,
ils sont présents dans les uvres caritatives, et génèrent
un large éventail d'activités. Le fait est que ces Mouvements
donnent aux chrétiens une motivation nouvelle et leur font
redécouvrir la beauté de la vie chrétienne et
les préparent ainsi à assumer des tâches d'évangélisation,
d'animation pastorale et de l'Eglise.
Zenit : En deux mots, comment êtes-vous
entré en contact avec le Renouveau ?
P. Cantalamessa : Ce n'est pas moi qui
suis entré en contact, Quelqu'un m'a pris et m'y a conduit.
Lorsque je priais les Psaumes j'avais déjà auparavant
le sentiment qu'ils avaient été écrits pour moi.
Puis lorsque je suis allé de Convent Station dans le New Jersey,
au Couvent des Capucins de Washington je me sentais attiré
par l'Eglise comme par un aimant. Ceci était une découverte
de la prière, et il s'agissait d'une prière trinitaire.
Le Père semblait impatient de me parler de Jésus et
Jésus voulait me révéler le Père. Je crois
que le Seigneur m'a fait accepter, après une grande résistance
l'effusion de l'Esprit puis, de nombreuses choses sont venues avec
le temps. J'enseignais l'histoire des origines chrétiennes
à l'Université catholique de Milan puis j'ai commencé
à prêcher, jusqu'en 1980 lorsque je suis devenu prédicateur
de la Maison pontificale.
Zenit : Dans le panorama des nombreux
Mouvements ecclésiaux, quelle contribution particulière
le Renouveau charismatique catholique peut-il apporter à l'Eglise
?
P. Cantalamessa : D'une certaine manière
nous sommes très humbles et discrets : nous n'avons pas de
pouvoir, nous n'avons pas de grandes structures, nous n'avons pas
de fondateur, mais le Renouveau charismatique catholique est celui
qui, par exemple, parmi tous les Mouvements ecclésiaux, s'intéresse
le plus à la théologie. Il y a en effet une demande
sur l'Esprit Saint dans le Renouveau charismatique. Tous
les grands traités des théologiens sur l'Esprit Saint
parlent en effet du Renouveau car il ne s'agit pas d'une spiritualité
à côté d'une autre, mais de la résurgence
du christianisme des origines, qui était celui des Apôtres.
Je crois que son objectif n'est pas limité à
un secteur en particulier mais plutôt à l'animation de
l'Eglise. Le Renouveau ne devrait pas conduire à constituer
des groupes, des Eglises. Malheur s'il en était ainsi ! Il
devrait être, comme le disait le cardinal Leo Joseph Suenens,
un courant de grâce qui se perd dans la masse de l'Eglise.